Page 4 - LA PENTECOTE
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L’ordre du Saint-Esprit fut aboli lors de la Révolution de 1789. Il ne reparut que sous la Restauration
pour disparaître de nouveau en 1830.
Autrefois, à Remiremont dans les Vosges, le 9 mars 1733, à verser au trésor de l’abbaye,
l’abbaye avait institué de sa propre pour l’année 1732, cent francs de Lorraine
autorité, une fête annuelle qui se célébrait le
lendemain de la Pentecôte, sous le nom de Un étrange impôt
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Kyriolés (nom dérivé de Kyrie eleison ). Pour le village de Saint-Maurice
Ce jour-là, l’abbesse, trônant au milieu des Il consistait dans deux rochelles (sorte de
dignitaires et des dames de son chapitre, du hottes faites d’écorce de sapin) qu’on
clergé, des grands officiers, des autorités de la remplissait de neige et que le marguillier
ville, ayant devant elle la population, recevait
du lieu (aide du sacristain) était obligé
les hommages et les félicitations de ses d’apporter au chapitre de Remiremont,
paroisses qui venaient en procession lui offrir au nom des habitants.
les premiers rameaux verts du printemps.
Ainsi, Saint-Nabord lui présentait des branches Lorsque la neige faisait défaut, ce tribut
de rosier sauvage ; Dommartin, des branches était remplacé par deux bœufs blancs.
de genièvre ; Raon-aux Bois, des branches de Mais cette substitution se faisait très
genêt ; Saint-Amé, des branches de lilas ; Saint- rarement, paraît-il ; elle ne s’opéra même
Étienne, des branches de cerisier ; Saulxures, que deux fois dans l’espace d’un siècle et
des branches de saule ; Vagney, des branches demi.
de sureau. Les deux rochelles étaient présentées à la
Chaque procession, bannière en tête, défilait grand’messe par le lieutenant du grand
devant l’abbesse et son chapitre, en chantant sénéchal qui entrait au chœur et déposait
un Kyriolé où les populations appelaient, sur le la première rochelle devant la stalle de
chapitre, sur le duc de Lorraine, sur le roi de l’abbesse et la seconde devant celle de la
France, sur elles et leurs biens, la protection de doyenne.
Dieu, de la Vierge, de saint Amé, de saint
Le chapitre de Remiremont, en échange
Romaric, de saint Urbain et des autres saints de cette redevance, payait le dîner du
qu’ils invoquaient ordinairement.
marguillier et lui donnait en outre dix-huit
Un impôt, non moins singulier, était exigé le deniers et un petit picotin d’avoine pour
même jour, du village de Saint-Maurice.
son cheval.
Dès 1570, cet hommage féodal était déjà
remarqué.
Un procès intenté par le chapitre de
Remiremont aux habitants de Saint-Maurice représentant la valeur des deux bœufs blancs.
qui avaient négligé ou refusé cet hommage en On leur appliquait ici le tribut extraordinaire à
1732, prouve que cet usage était encore en cause de leur mauvais vouloir ; ils durent en
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vigueur au 18 siècle. outre payer une forte amende et les frais de
procédure.
Les habitants de Saint-Maurice furent
condamnés par la cour souveraine de Nancy,
Texte proposé par Solange Bouvier
Source : Les fêtes chrétiennes en Occident de Philippe Rouillard, paru en 2003
2 Prière liturgique des Églises catholique et orthodoxe