Page 10 - DANS LES PAS DE LAMARTINE ENTRE HISTOIRE ET ANECDOTES
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Quand le soleil est au milieu du ciel, elle déplie un linge blanc qui préserve le pain et le fromage
du sable que le vent y jette; elle étend sur la tranche de pain noir le blanc laitage à moitié
durci, entouré de la feuille de vigne et semé des grains luisants du sel gris; ils mangent,
essoufflés, l'un à côté de l'autre, comme deux voyageurs lassés d'une longue marche, au bord
du fossé de la route, échangeant à peine quelques rares paroles sur les promesses que le
printemps fait à la vendange.
Au pied d'un cep qui l'a distillée l'automne précédent, une bouteille rafraîchie par l'ombre,
leur verse goutte à goutte la force et la joie. Ils s'endorment après sur la terre qui fume de
chaleur, la tête appuyée sur leurs bras recourbés, et ils repuisent leur vigueur dans les rayons
brûlants de ce soleil qui sèche leur jeune sueur.
Le soir, on les entend redescendre en chantant de tous les sentiers des collines, et les petits
bergers, qui redescendent avec leur troupeau de la montagne, ramènent à la jeune femme,
pour le repas du soir, sa chèvre favorite, les cornes enroulées de guirlandes de buis.
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