Page 2 - VOLTAIRE ET L'AFFAIRE CALAS
P. 2
L’affaire Jean Calas commence le 13 octobre 1761, lorsque ce négociant protestant toulousain
découvre à son domicile son fils Marc-Antoine mort étranglé. Pensant qu’il s’est donné la mort
et afin d’éviter le traitement infligé à l’époque aux suicidés, il est possible d’émettre
l’hypothèse, non vérifiable, que Calas ait maquillé le suicide en crime.
Mais la rumeur publique et la Justice l’accusent de l’avoir lui-même assassiné pour l’empêcher
de se convertir au Catholicisme. Le jugement est rendu le 10 mars 1762. Jean Calas est
condamné à mort. Il est roué vif, puis étranglé et brûlé.
Cette affaire intervient dans le contexte de l’Édit de Fontainebleau qui révoque l’Édit de
Nantes de 1685 et fait la chasse aux Huguenots afin que ceux-ci renoncent à leur foi
protestante.
L’affaire scandalise Voltaire. Il s’agit de son premier combat contre ‘‘l’infâme’’, l’intolérance
fanatique religieuse, contre l’erreur judiciaire due aux magistrats, les ‘‘bœufs-tigres’’ comme
il les appelait, car bêtes comme des bœufs et méchants comme des tigres, disait-il.
Persécutés après la Révocation de l’Édit de Nantes par Louis XIV en 1685, les Protestants sont
condamnés à se convertir au Catholicisme.
Nombre d'entre eux choisissent l'exil, bien qu'il leur soit interdit de quitter le royaume.
Ceux qui choisissent de rester se font le plus discret possible, comme la famille Calas, dont le
père est marchand d'étoffe, à Toulouse. Les condamnations subsistent toujours et les adeptes
de l'Église réformée, les Huguenots, sont perçus comme une menace, y compris par la
population.
Ainsi, dans ce climat de tension et de suspicion où quatre réformés venaient d'être pendus à
Toulouse, le père, Jean Calas, découvre son fils mort étranglé. Il tente de maquiller le suicide
en meurtre pour ne pas jeter le déshonneur sur sa famille. Car, sous l'Ancien régime, le corps
des suicidés était traîné par un cheval dans la rue, face contre terre, sous les huées du peuple
puis, jeté aux ordures.
Meurtre ou suicide, les médecins légistes soupçonnent surtout le père d'avoir voulu empêcher
son fils de se convertir au Catholicisme, soupçons alimentés par la rumeur.
Faute de preuves établissant la culpabilité de Jean Calas, il est fait appel à témoin. C'est sur la
base d'indices et de présomptions que le 18 novembre 1761, la famille Calas, le père, la mère
et leurs enfants, sont accusés du meurtre de leur fils, Marc-Antoine.
Ils sont interrogés par les Capitouls (les conseillers municipaux de Toulouse, qui disposaient
de fonctions judiciaires). Les suspects parlent d'abord d'un crime de rôdeur puis avouent le
maquillage du suicide.
Ami de Jean-Jacques Rousseau, Loyseau de Mauléon, leur avocat, n'empêchera pas
cependant la condamnation à mort de Jean Calas qui subit les pires supplices.
Le 18 novembre 1761 : la sentence des Capitouls affirme la culpabilité des accusés, Jean Calas,
Anne-Rose, sa femme, Pierre Calas son fils, Jeanne Viguière (leur servante très catholique) et
Gaubert Lavaysse (un ami bordelais de la famille, présent le jour du suicide).
Ceux-ci clament leur innocence et font appel devant le Parlement de Toulouse.
Le parlement s'appuyant sur l'enquête des Capitouls confirme la culpabilité.
Jean Calas n'avoue pas sous la torture, il proclame son innocence jusqu’à son dernier souffle.
1