Page 22 - CONFERENCE ''VAUBAN, VISIONNAIRE ET HUMANISTE'' PAR JEAN-MARIE ROUECHE
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VAUBAN ne se contente pas de lancer des propositions audacieuses dans les domaines de l'économie
               et  de  la  fiscalité,  il  s'aventure  sur  le  terrain  proprement  politique,  nous  dirions  aujourd'hui  sur  le
               domaine réservé du Roi.


                    Histoire de La Dîme royale (1707)
                La fin de la vie de Vauban est marquée par l'affaire de La Dîme royale : dans cet essai, distribué sous
                le  manteau  malgré  l'interdiction  qui  le  frappe,  Vauban  propose  un  audacieux  programme  de
                réforme fiscale pour tenter de résoudre les injustices sociales et les difficultés économiques de la
                fin du règne du Roi Soleil.

                a.     L’état de la F a  e
                En ces « années de misère », la grande famine de 1693-1694 fait 1,3 million de morts, soit un
                vingtième de la population. Je vous renvoie à La Bruyère qui a défini le paysan français, tel un animal
                errant se nourrissant de pain noir, d'eau et de racines. On en était venu à faire du pain avec des
                fougères ou des choux ou des navets. Les pauvres gens se mirent à ronger l'écorce des arbres. Les
                grandes routes n'étaient couvertes que de mendiants.
                Vau a  e  att i ue la  espo sa ilit  au s st  e fis al  u’il juge i juste et i  galitai e.

                b.     Les impôts existants
                Voyons, en quelques mots en quoi consistait, et comment se percevait l'impôt, à l'époque où paru
                le livre de la Dîme royale.

                Le premier et le plus ancien des impôts était celui de la taille. Elle se basait sur l'estimation des
                terrains ou des biens de la personne et elle était absolument arbitraire, essentiellement variable, à
                la discrétion des arpenteurs, ou des collecteurs qui dépouillaient impitoyablement les pauvres gens.
                La taille, bien entendu, ne frappait que les biens de roture et les roturiers. Le mot roture désignait
                en  latin  des  chartes  une  terre  récemment  défrichée  et  passible  d'une  redevance  au  seigneur.
                Corrélativement, le roturier était le possesseur d'une roture, terre non noble sujette à redevance.

                Le second des impôts était celui des aides. Il frappait les denrées, le vin, la bière, les liqueurs. Il était
                perçu par toute une armée d'employés, qui jour et nuit, traquaient le menu peuple.
                Le troisième impôt était la gabelle, ou impôt sur le sel, dont les ordonnances royales rendaient la
                consommation obligatoire.
                Il y avait encore un quatrième impôt, celui des douanes intérieures qui frappait les produits et
                 a  ha dises, d'u e faço  telle e t e ag   e et ve atoi e,  u’o  avait, pou  ai si di e,  e o    à
                les faire circuler.

                c.     Projet de Capitation
                En 1694, Vauban écrit un premier mémoire intitulé « Projet de Capitation ». Il propose un impôt
                levé, sans aucune exemption, sur tous les revenus visibles (les produits fonciers, les rentes, les
                appoi te e ts…  et  o da  e la taille.
                L'année suivante en 1695, le pouvoir royal met effectivement en place une capitation, un impôt
                auquel, en théorie, tous les sujets, des princes du sang aux travailleurs de terre, sont assujettis en
                fonction de leur fortune. Mais contrairement à l'idée de Vauban, cet impôt s'ajoute aux autres, et la
                plupart des privilégiés, par abonnement ou par rachat, ont tôt fait de s'en faire dispenser. Vauban
                est fu ieu   a  sa p opositio  a  t  d vo  e et  ’est l’effet i ve se  ui a  t  o te u !
                D s     , il se  e et au t avail pou  u e  ouvelle p opositio . Aid  pa  so  se   tai e, l’a    Ragot
                de Beaumont, il rédige 4 manuscrits de la Dîme royale entre 1697 et 1700. Il les envoie au roi, aux
                ministres, dont Chamillart et à ses amis.






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