Page 23 - CONFERENCE ''VAUBAN, VISIONNAIRE ET HUMANISTE'' PAR JEAN-MARIE ROUECHE
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d. Les propositions de la dîme royale
Le vrai titre est : « Projet d'une dîme royale qui, supprimant la taille, les aides, les douanes d'une
province à l'autre, les décimes du Clergé, les affaires extraordinaires ; et tous les autres impôts
onéreux et non volontaires, et diminuant le prix du sel de moitié et plus, produirait au Roy un revenu
certain et suffisant, sans frais, et sans être à charge à l'un de ses sujets plus qu'à l'autre, qui
s'augmenterait considérablement par la meilleure culture des terres ».
Dans cet ouvrage, il met en garde contre de forts impôts qui détournent des activités productives.
Vauban propose dans cet essai de remplacer les impôts existants par un impôt unique et progressif
de 5 % à 10 % sur tous les revenus, sans exemption pour les ordres privilégiés (le roi inclus). Il
propose une segmentation en classes fiscales en fonction des revenus. L'impôt doit servir une
politique, les classes fiscales doivent être plus ou moins favorisées à fins d'enrichir la société et par
o s ue t l’État.
La Dîme royale supprime d'un seul coup : taille, aides, douanes, gabelle, etc., et comme le dit Vauban
« ... tous ces impôts que le système féodal avait accumulé sur les populations rurales en faveur des
nobles et des prêtres oisifs ». La Dîme fait disparaître en même temps le privilège injuste et barbare
qui permettait aux classes dites supérieures de ne pas contribuer aux charges de l'Etat.
Vauban demande que toutes les personnes qui habitent le Royaume supportent les charges
publiques, en proportion de leurs revenus, sans distinction de classes. Il réclame l'égalité de tous les
Français devant l'impôt.
L'impôt unique proposé par Vauban repose sur une double base :
• La propriété foncière et immobilière. On lève un dixième, quinzième ou vingtième des
revenus, suivant les lieux et les circonstances.
• On prélève une certaine somme sur les revenus du commerce et de l'industrie.
Puis, viennent quelques impôts complémentaires, tels que ceux que Vauban propose d'établir sur :
les titres de noblesse, sur la dorure des habits, sur les pierreries, sur les objets de luxe, etc.
La conclusion est que l'adoption du système proposé diminuerait de plus de moitié les charges qui
pesaient sur le peuple, et que les revenus de l'État se trouveraient considérablement augmentés.
On se doute bien que les classes dirigeantes d'alors ne purent ou ne voulurent pas comprendre cette
proposition et la combattirent vaillamment.
e. Quelle a été la destinée de la Dîme royale ?
Au fil du te ps, u e o fia e fo te s’ tait ta lie e t e Vau a et ses sup ieu s, le i ist e de la
Guerre comme le roi. Ils l’e ou ageaie t d’ailleu s da s ses p opositio s, da s u i t t ie
o p is de pa t et d’aut e. Depuis u’il est Ma hal, Vau a a « ses e t es » p s du oi, ’est-à-
di e u’il pouvait le e o t e sa s t e a o . So o ta t ave le Roi lui permettait de
soumettre directement ses idées. Louis XIV lui rendait bien cette franchise, cette liberté de parole
et de jugement, en lui accordant une confiance absolue en matière de défense du royaume mais par
pour le reste comme le roi lui-même lui écrivait en 1693 :
« J'ai reçu toutes les lettres que vous m'avez écrites ; je n'y pas répondu bien régulièrement et je me
suis contenté de profiter de ce qu'elles contenaient de bon, selon mes desseins qui ne s'accordent
pas tout à fait avec vos pensées. Continuez à m'écrire ce qui vous passe par la tête et ne vous rebutez
pas, quoique je ne fasse pas toujours ce que vous proposez ».
Dans les premiers jours de juin 1700, Vauban lit le manuscrit au roi en trois audiences successives
de deux heures et demie chacune, dans la chambre de madame de Maintenon et lui en remit une
copie manuscrite. Selon Vauban, le roi y a applaudi.
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